RENEE DE FRANCE, fille de la duchesse ANNE, est éliminée du trône breton par François Ier.
Publié le 5 mars 2012 par Louis Mélennec. Deuxième Publication 2024 par l’IDBE (12 pages).
LA PLUS GRANDE SPOLIATION DU SIECLE. PREMIERE PARTIE.
L’élimination de Claude de France du Duché de Bretagne, par Louis Mélennec, proposé à ABP.
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Le sujet, je l’ai dit maintes fois, est surabondamment documenté. Pourtant, il n’a suscité aucune thèse ni aucune recherche de la part de l’université de Bretagne : tout ce qui est scandaleux – ou presque – dans le passage de la Bretagne indépendante à la Bretagne occupée et soumise a été éliminé par nos « agrégés » et par nos « docteurs ».
La connaissance du destin assez tragique de Renée de France est pourtant une pièce maîtresse de notre histoire.
J’ai « Harponné » à plusieurs reprises, en 2012, l’université de Bretagne pour qu’elle se saisisse de ce sujet majeur. RIEN, RIEN, RIEN, comme d’habitude.
Fille des deux souverains les plus puissants et les plus fortunés d’Europe, Anne de Bretagne et Louis XII, le destin de RENEE DE FRANCE ne pouvait être que fabuleux. Son grand malheur est d’avoir perdu sa mère alors qu’elle avait trois ans (Anne est morte le 9 janvier 1514), puis son père un an plus tard (Louis XII est décédé le 1er janvier 1515). Dès lors, elle et sa soeur furent prisonnières de deux authentiques crapules, prédateurs de grande envergure, connus et jugés comme tels de leur temps, détestés d’une manière unanime : François 1er, et sa mère Louise de Savoie. Ce qui est gravissime, surtout pour Renée, qui a vécu jusqu’en 1575, c’est QUE TOUTES LES DEUX, D’UNE MANIERE DELIBEREE ET VOULUE, ont été soigneusement maintenues dans l’ignorance totale de leurs droits. Ce qui a rendu possible ce que d’aucuns ont dénommé » le plus grand hold up du siècle « .
LES SPOLIATIONS DES » SOUS AGES « .
De tous temps, les mineurs ont été menacés d’être spoliés par leur entourage, spécialement par ceux qui sont chargés de leur tutelle, et qui, à ce titre, sont juridiquement autorisés à prendre des mesures en leur nom, jusqu’à leur majorité. Plus l’enfant est jeune, plus le prédateur a de chances d’être à l’abri de sanctions. S’il s’avère qu’il est puissant – à plus forte raison s’il est roi de France -, l’impunité lui est assurée, quelle que soit la gravité de ses crimes. (Du temps de la minorité d’Anne de Bretagne, trois personnage au moins se dirent ducs de Bretagne, alors même qu’elle avait été couronnée : le roi Charles VIII de France, son proche parent le vicomte de Rohan, René de Brosses – Bretagne, descendant de Jeanne de Penthièvre et de Charles de Blois).
Les juristes du moyen âge connaissent parfaitement le problème des mineurs, et ont écrit maintes dissertations sur le sujet, pour tenter de prévenir et punir les tuteurs et autres personnes « baillées par la justice aux sous âgés pour les défendre, les garantir et les garder, et pour maintenir leurs droits » (Philippe de BEAUMANOIR, tome 1, page 275, n° 570; ce traité classique a été écrit au 13 ème siècle. Cet ouvrage – et les autres écrits après lui – doivent être des livres de chevet pour les historiens actuels qui ont la prétention d’écrire sur le moyen âge; faute de quoi, on est exposé à de grossières erreurs d’interprétation, sur presque tous les sujets importants. En particulier sur l’hommage, et les obligations qui en résultent; les lecteurs savent, parce que je l’ai répété souvent, que l’hommage que le Duc de Bretagne prête au roi de France lie les deux hommes par un contrat d’alliance simple et réciproque, en aucun cas par des relations de sujétion du Duc, qui est un souverain dans sa Principauté, comme le roi de France l’est dans la sienne. L’un des adages célèbres du Duché ( » Le Duc de Bretagne est Roi dans sa Duché, comme le roi de France l’est dans son royaume « ), n’est pas une formule à visée publicitaire, mais traduit la réalité : je renvoie, pour la centième fois au moins, les » hystoriens » bretons à l’épais chapitre rédigé par Marcel PLANIOL dans son histoire des Institutions (notamment, tome 3, pages 72 et 73, ainsi que les notes en bas de ces pages) …. afin que TOUS SACHENT ENFIN QUE LA BRETAGNE MEDIEVALE EST UN ETAT SOUVERAIN, entièrement et pleinement, non un fragment de la France, pays entièrement et TOTALEMENT ETRANGER, et de surcroît, ennemi).
(Sur la Souveraineté totale des Ducs de Bretagne, une fois de plus, lire et relire PLANIOL, tome 3, pages 51 à 92, sans omettre les références très nombreuses).
François Ier, tuteur de sa belle soeur Renée, et Louise de Savoie, sont jugés d’une manière plus que péjorative par les ambassadeurs italiens et les témoins du temps qui osent écrire la vérité, ce qui semble avoir échappé aux historiens modernes. Ceux-ci – à quelques uns près -, n’ont retenu de lui que l’image d’un bâtisseur de châteaux, de commanditaire d’oeuvres littéraires, picturales, poétiques ou autres, alors qu’il fut un roi prodigue, dépensier, totalement inconséquent, inapte ni aux fonctions gouvernementales, sans aucune vue sur une vraie politique, entièrement voué à ses plaisirs, sans aucune considération pour son peuple, ni d’ailleurs pour personne (hors sa mère, Louise de Savoie, dont il fut l’enfant docile et attardé, et sa soeur Marguerite), laissant après lui un gouvernement absolu, et une France ruinée et en lambeaux. Aujourd’hui, on les désignerait, le fils et la mère, du terme peu flatteur de » truands « . François Ier n’a pas été un roi gentilhomme, mais un roi-bandit, l’un des pires que la France ait connus. Ces termes sont d’ailleurs généreux et timides. Cette observation préliminaire est utile pour faire comprendre ce qui est advenu sous son règne à la Bretagne, à sa femme Claude, à sa belle soeur Renée.
(Voir, sur ce point :
– Sismondi, Histoire des Français, Bruxelles, 1837, pages 199 et suivantes. cet ouvrage est une mine de références, et de citations précieuses. Les Bretons exècrent François d’Angoulême dès que, marié à Claude, en mai 1514, son beau père lui donne la direction des affaires de Bretagne. Avant que l’année soit écoulée, ils envoient une délégation se plaindre en plein parlement de Paris, en présence de Louis XII (de Maulde la Clavière, page 381 …). François devenu roi le 1er janvier 1515, à la mort de Louis XII, impose le silence à tous, car il sera un roi absolu, auquel personne n’osera plus s’opposer, sous peine de perdre la vie; il sera un maître en matière de corruption, par ailleurs, ce dont on a des preuves surabondantes.
– De Maulde la Clavière, page 381;
– Le bibliophile Jacob, Louis XII et Anne de Bretagne; KK.240;
- Mignet, pages …
– Lemonnier, La lutte contre la Maison d’Autriche, …. Cet auteur est au moins aussi sévère que Sismondi, et, comme lui, fournit des preuves surabondantes sur l’incompétence et la malhonnêteté foncières de François 1er, homme foncièrement sans scrupules.).
Nous verrons, à la fin de cet article, en évoquant le procès intenté par Renée à son neveu le roi Charles IX de France, en quoi consistait son héritage, dont on peut dire qu’il était littéralement fabuleux. Les biens matériels dont elle a été délestée, ne sont pourtant pas l’essentiel de l’affaire : c’est la Bretagne qui a été écrasée sous la botte de François 1er, par des procédés répugnants) : la jeune fille a été piétinée, la Bretagne, qui devait retrouver sa pleine indépendance, est passée sous la coupe de son pire ennemi.
Si elle n’avait été dépouillée par son beau frère François 1er, le mari de sa propre soeur Claude, cette femme de caractère, très intelligente, très cultivée, d’une morale aussi stricte que sa mère, aurait fait une magnifique duchesse de Bretagne. Les lois fondamentales du royaume de France écartant les femmes du trône, on lui prête d’avoir dit : » Si Dieu m’eût donné de la barbe au menton, et que je fusse un homme, les Français seraient tous mes sujets, ils seraient tels, si cette loi salique ne me tenait trop de rigueur » (Brantôme, page 216). (Aux termes de la loi dite » salique « , les femmes ne peuvent régner en France, alors qu’en Bretagne, les femmes sont jugées dignes d’être placées à la tête de l’Etat).
Renée ayant été mariée à 18 ans au duc Hercule de FERRARE, souverain d’une petite principauté italienne, fils de Lucrèce BORGIA, petit fils du pape Alexandre VI BORGIA, les italiens, eux, se sont passionnés pour ce personnage exceptionnel, petite fille de François II, deuxième fille de ANNE de BRETAGNE. Comme d’habitude, nous sommes très largement en retard, dans l’écriture de cette importante page de notre histoire nationale, pour cause de » bouclage » intellectuel quasi-total de tout ce qui gêne durant cette période, pendant laquelle nous avons été spoliés et écrasés.
Le présent article se limitera à ce qui nous concerne, directement, quant à la manière dont à usé notre ennemi millénaire pour s’emparer de la Principauté souveraine de Bretagne. Le reste, notamment les péripéties étonnantes de la vie de Renée en Italie, ont été explorés, et racontés avec un grand luxe de détails, par d’autres auteurs (voir la bibliographie sommaire ci-dessous).
1 – LES ENFANTS D’ANNE DE BRETAGNE.
Anne de Bretagne a été une épouse très prolifique. L’un de ses détracteurs, Bernard QUILLIET, dans des termes vulgaires, a dit qu’elle était une dégénérée, une » fin de race « , ce qui expliquerait, selon cet éminent auteur, que si peu de ses enfants aient survécu (Louis XII, Paris, 1986, éditions Fayard, pages ). C’est stupide. A cette époque, la mortalité infantile est effrayante. Souvent, peu survivent.
De Charles VIII, elle a six enfants, dont un seul – Charles-Orland – né le 10 octobre 1492, dépasse l’âge de trois ans. Il meurt le 16 décembre 1495.
De Louis XII, elle conserve deux filles – Claude – née le 11 octobre 1492 et Renée, née le 25 octobre 1510. Deux enfants de sexe mâle meurent.
On ne connait les défaillances de la santé d’Anne qu’à la fin de sa vie, en 1513-1514, et les causes de sa mort, une infection urinaire récidivante affreusement douloureuse. Je n’ai décelé chez elle aucune tare ou maladie susceptible d’expliquer la mort de ses nombreux enfants, sauf, peut-être, la syphilis qui lui aurait été communiquée par ses deux maris. Il n’est pas exclu que ses maris (Charles VIII et Louis XII), aient été atteints de syphilis, pour avoir » pratiqué » un nombre considérable de femmes, parmi lesquelles des putains avérées ou de profession. Elle laisse, malgré tout, par ses deux filles Claude et Renée, une très abondante descendance. Psychiquement, quoique très sensible et facilement blessée, elle ne présente aucun signe patent de névrose ou de psychose. Avec des moments difficiles, elle semble avoir été un monument de solidité mentale, du début jusqu’à la fin (voir : Mélennec, psychiatrie, névroses ….).
2 – L’INDEPENDANCE DE LA BRETAGNE, garantie ad vitam aeternam, par le TRAITE DE JANVIER 1499, conclu entre la Bretagne et la France, à la faveur du mariage de la duchesse ANNE et du roi LOUIS XII DE FRANCE.
On connaît les évènements qui ont suivi la mort (par traumatisme crânien, c’est à dire par accident) de Charles VIII, roi de France et mari d’Anne de Bretagne, le 7 avril 1498.
Anne, son pays ayant été réduit à néant par Charles VIII, de 1491 à 1498, impose un nouveau statut pour la Bretagne, par un traité négocié pied à pied avec Louis XII. Ce traité, ouvrage capital d’Anne de Bretagne, condition sine qua non de son mariage avec Louis XII, est signé à Nantes le 7 janvier 1499.
Pour résumer ce contrat complexe (Morice, Preuves III, 813) :
– La Bretagne et la France sont et resteront à jamais des pays distincts et séparés, comme ils l’ont toujours été.
– La Bretagne sera gouvernée par son Duc, et conservera, à jamais, ses institutions propres (premier ministre, gouvernement, parlement, chambre des comptes …).
– Le trône de Bretagne échoira au deuxième enfant du couple royal – fille ou garçon -, après la mort dAnne et de Louis naissent deux entants, et si le premier de sexe mâle, hérite du trône de France. La clause reste valable pour les générations suivantes. En toute hypothèse, ce sont les « vrays et plus proches héritiers » qui « succèderont auxdits Duché et seigneuries », sans que « les rois en puissent rien leur quereller » ( = contester).
Ce traité, absolument capital, qui sera une fois de plus violé par la France, EST L’OEUVRE MAJEURE dAnne de Bretagne. N’aurait-elle que ce traité à son actif, cela ferait d’elle une héroïne.
Contrairement à ce qu’on peut lire dans le pamphlet publié chez FAYARD en 1999, par Georges Minois, réédité à plusieurs reprises, Anne a été une grande reine, plus encore une grande Duchesse …Elle n’a cessé d’oeuvrer pour le pays de ses ancêtres, qu’elle considérait comme infiniment plus noble et plus ancien que les autres principautés d’Europe ..
3 – LES TRAITES DE MARIAGE DE CLAUDE ET DE CHARLES D’AUTRICHE, futur Charles QUINT.
(Dans les lignes qui suivent, nous désignerons, bien que les textes du temps lui donnent des titres multiples, le futur Empereur Charles Quint sous le nom ce Charles d’Autriche, ce qui évitera évitera les confusions).
La volonté intransigeante d’Anne de Bretagne de mettre son pays à l’abri de la France, son voisin prédateur, ne se démentira jamais. Le fait d’être mariée à deux rois de France, non seulement ne changera rien à sa détermination. Au contraire, elle utilisera sa qualité de reine de France, en tout cas sous Louis XII, qui lui abandonne le libre gouvernement du Duché, pour tenter de parvenir à ses fins, pour faire échapper la Bretagne à l’emprise française.
Après avoir signé, à Nantes, avec son mari Louis XII le traité de mariage en janvier 1499, garantissant la couronne de Bretagne à l’un de ses enfants, ou à l’un de ses successeurs, Anne se montre extrêmement déterminée à s’opposer au mariage, voulu par son mari, de leur fille Claude avec l’héritier du trône de France, François d’Angoulême.
Par Les traités de 1501 et 1504, Claude, destinée – sa soeur Renée ne viendra au monde qu’en 1510 – à devenir Duchesse de Bretagne, épousera Charles d’Autriche, le futur Charles QUINT. Ce projet échoue, par le fait de Louis XII, à la grande colère d’Anne de Bretagne.
Ce chapitre a été longuement traité dans notre mémoire de DEA sur le rattachement de la Bretagne à la France (pages 49 à 54). Il est nécessaire de s’y reporter, comme constituant un aspect essentiel de la politique menée par Anne de Bretagne, défendant becs et ongles son pays, décidée à tout pour empêcher que le Duché Souverain ne tombe sous la coupe de son ennemi millénaire, la France. Ce chapitre étant peu connu – et de surcroît traité d’une manière plus que cavalière par les historiens français – et même bretons, en particulier QUILLIET et MINOIS -, …..il est nécessaire de s’y reporter, et de le relire avec soin.
On y ré-apprendra que, alors que Louis XII, roi de France, VEUT ABSOLUMENT que leur fille Claude, héritière naturelle du Duché souverain de Bretagne jusqu’à la naissance de Renée, leur deuxième enfant (Claude est née en 1499, Renée en 1510), épouse François d’Angoulême, son neveu, appelé à devenir roi de France (il le deviendra le Ier janvier 1515, le jour de la mort de Louis XII), Anne s’oppose avec FEROCITE à ce mariage, ceci JUSQU’A SA MORT, le 9 janvier 1514. Pour une raison simple, qui est clairement connue et exposée par les auteurs ses contemporains : si Claude épouse effectivement le roi de France, LA BRETAGNE, A COUP SÛR, tombera sous la coupe de l’ennemi millénaire haï : la Bretagne ne pourra échapper à une annexion. En revanche, si Claude épouse un prince étranger (en l’espèce : Charles d’Autriche), non seulement la Bretagne conservera toutes ses Institutions, mais aura son Prince particulier, si l’on garantit que le deuxième enfant du couple sera l’héritier du trône breton : la Bretagne ne deviendra pas une province de l’Empire – comme on peut encore le lire dans certains livres mal informés -, mais conservera son indépendance. Cet aspect de la politique d’Anne de Bretagne est tout-à-fait remarquable.
4 – Renée de BRETAGNE est écartée par son père, Louis XII, du trône de Bretagne, au profit de sa soeur CLAUDE.
Pourquoi Renée n’a-t-elle pas été proclamée Duchesse de Bretagne, dès la mort de sa mère, en janvier 1514 ? On manque malheureusement d’archives pour la période qui suit la mort d’Anne de Bretagne. Les documents ont ils disparu, comme tant d’autres? Ont-ils été détruits, comme cela est d’usage lorsqu’un nouveau souverain monte sur le trône, et qu’il ordonne la destruction de tout ce qui peut le compromettre ? Ou se produira-t-il le miracle qui a permis à M. Alain MORGAT, auteur d’une thèse précieuse pour la Bretagne, de mettre la main sur une volumineuse liasse de documents à la bibliothèque nationale …
Selon le traité régulièrement conclu par Anne de Bretagne et Louis XII en janvier 1499, à Nantes, Renée est, juridiquement, l’incontestable duchesse héritière, en qualité de deuxième enfant du couple royal.
On prête à Anne de Bretagne d’avoir voulu, dans les mois qui ont précédé son décès, prendre toutes les dispositions pour que cela soit, et même d’avoir exprimé à nouveau sa volonté ferme sur son lit de mort (Anne PUAUX, page 5). Bien qu’il n’y ait présentement peu d’ archives sur ce point, cela est sûrement vrai, PUISQUE LEDIT TRAITE DE JANVIER 1499 a ETE FAIT DANS CE BUT.
Dans le fracassant procès que Renée intente de longues années plus tard à son neveu, le roi Charles IX de France (mémoire de DEA, page 58), ce sera son argument majeur : à la mort de sa mère, elle aurait du être proclamée duchesse de Bretagne, elle a été spoliée. Ses avocats écrivent, répétitivement et avec fermeté :
» Par le traité de mariage entre le Roi Louis XII et la Reine Anne, ses père et mère, le DUCHE DE BRETAGNE APPARTIENDRA AU SECOND ENFANT DE LEUR MARIAGE, (que cet enfant) soit mâle ou femelle « .
Ce qui est juridiquement INDISCUTABLE. La clause de succession aurait du être appliquée d’une manière automatique, puisqu’elle exprimait le Droit (voir ci-après : Morice).
Que s’est-il passé ? Pourquoi Claude se retrouve-t-elle duchesse de Bretagne – jusqu’à sa mort, en 1524, alors que, juridiquement, c’est sa soeur Renée qui devrait l’être ?
Les textes du temps sont assez clairs et concordants pour l’expliquer. Louis XII, seul maître en Bretagne après la mort de sa femme Anne, et jusqu’à sa propre mort, un an plus tard (dans ses actes, il porte le titre de Duc de Bretagne), a toujours témoigné sa crainte que la Bretagne, si elle recouvrait sa totale indépendance, comme sous ses anciens Ducs, serait à nouveau la source de menaces pour la France, voire de guerres, avec le soutien, notamment, de ses alliés Anglais.
Il n’y a pas d’autre explication plausible que celle de garantir la paix future de son royaume, d’avoir écarté sa fille Renée – en dépit de la très profonde affection qu’il lui porte -, du trône breton. (Louis XII aime les enfants, les siens par dessus tout). C’est une décision politique, certes gravement préjudiciable aux intérêts de la Bretagne, contraire au droit, mais qui se comprend dans dans une optique française : roi de France, scrupuleux, très soucieux de la prospérité et de la sécurité du pays dont il a la garde, Louis XII n’est en rien l’ennemi des Bretons; proche parent de la » tige royalle » de Bretagne, il a combattu avec eux dans leurs armées à Saint-Aubin-du-Cormier, et a subi un dur et long emprisonnement à cause de cela. Mais il a une très haute idée des impératifs liés à sa fonction : en mariant sa fille Claude à François d’Angoulême, et en autorisant celui-ci à s’intituler duc de Bretagne – en sa qualité de mari de la Duchesse – (Morice, Preuves, III, …), il incarne l’affection qu’il porte à son pays et à son peuple. C’est son devoir – pense-t-il -, et, du point de vue d’un roi de France, cela se comprend aussi aisément que l’on comprend aisément la volonté féroce d’Anne de Bretagne de soustraire son Pays à la menace de phagocytose par la France.
CLAUDE DEVIENT DUCHESSE DE BRETAGNE A LA MORT DE SA MERE, et épouse FRANCOIS D’ANGOULEME, qui devient Duc de Bretagne, et en porte le titre jusqu’à son accession au trône de France, en 1515.
C’est donc Claude, alors âgée de 15 ans, qui porte le titre de duchesse de Bretagne, jusqu’à sa mort, en 1524. Sans aucun doute par la volonté de son père Louis XII, qui a toujours eu la volonté de la marier à son neveu François, pour faire d’elle non pas seulement une reine de France, mais aussi la duchesse en titre. (Sur ce point, les preuves sont surabondantes).
De fait, elle épouse François d’Angoulême en mai 1514, quatre mois après le décès de sa mère. D’excellents développements sur ce mariage sont dispersés dans l’ouvrage érudit de R. de Maulde la Clavière, inconnu en Bretagne, et d’ailleurs introuvable, sauf dans la bibliothèque de Mélennec). Il n’y a aucune trace d’opposition de la part des Bretons pour qu’il en soit ainsi : ils avaient consenti à ce mariage dès 1506 (aux Etats généraux de Tours, Georges PICOT, Histoire des Etats généraux, Genève 1979, Mégariotis Reprints, réimpression de l’édition de Paris de 1872, tome 1, pages 552 et 553). Et sans aucun doute avaient-ils à craindre que si Renée, âgée de quatre ans à la mort de son père, devenait duchesse, les minorités des souverains ayant toujours mis en péril leur pays, et occasionné des troubles souvent graves, la Bretagne mise en situation d’être gouvernée par le tuteur de la vraie duchesse héritière – son beau frère François -, eut été encore bien plus vulnérable, incapable de se défendre, et broyée. Non seulement la qualité de Duchesse de Claude n’a jamais été mise en cause par les Bretons, mais ils l’ont même souhaité et demandé à Louis XII qu’elle le devînt, et que son mari François d’Angoulême portât le titre de duc de Bretagne : naïfs, ils crurent que si François accédait à cette haute dignité, ils seraient gouvernés » comme ils l’avaient été sous les Ducs » (le témoignage de Dom Morice, page 246, tome …, lève tous les doutes).
Mais leur illusion ne dura guère. Marié en mai 1514 avec Claude, les Bretons eurent tôt fait de découvrir à quel personnage ils avaient affaire. Et le 1er janvier suivant, Louis XII étant décédé, François d’Angoulême devint roi de France : dès lors, la Bretagne fut captive de la couronne de France, et bientôt serve.
Il ne faut pas croire que le silence des Bretons durant cette période équivaut à l’ acceptation de la situation. François 1er ne fait l’objet d’aucune contestation ouverte, non pas parce que les bretons sont heureux de le voir marié avec leur Duchesse, mais parce que s’opposer à lui serait, à coup sûr, mettre sa carrière et sa vie en péril. Cet homme est détesté dans tout son royaume, il l’est encore plus en Bretagne, pays xénophobe et résolument anti-français, ou il n’est qu’un prince non seulement étranger, mais menaçant pour l’indépendance nationale. La naïveté de Pocquet, sur ce point, relatant la » réunion » de la Bretagne à la France (Histoire , tome 5, page) confine à la sottise (un de plus !). Et son ignorance de cette période est risible.
5 – RENEE DE BRETAGNE EST PROMISE PAR SA MERE ANNE ET SON PERE LOUIS XII au futur empereur du Saint Empire Romain germanique.
RENEE, PAR LA VOLONTE DE SES PERES ET MERE, EST MARIEE – par » paroles de futur » (per verba de futuro), c’est à dire fiancée – à CHARLES, futur Empereur.
Ecartée par son père du trône de Bretagne – quoique celui-ci, dans l’acte du 27 octobre 1514, réserve expressément les droits de sa fille au trône breton (Morice, Preuves, III, page 925), Renée n’en est pas moins destinée par la volonté du Roi son père et plus encore par celle de sa mère Anne de Bretagne, à un destin très brillant : tous deux veulent faire d’elle une Impératrice du Saint Empire, à tout le moins une reine, puisque tel est son destin naturel de fille des deux plus puissants Souverains d’Europe.
Texte adressé à nos chers docteurs et agrégés de Bretagne : que faisiez vous, où étiez - vous ? DORMIEZ VOUS ???
A diffiser aux tricheurs, aux ignares, aux jaloux.
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DEUXIEME PARTIE : RENEE DE FRANCE.